Voici le plus grand cimetière juif de Varsovie et un des panthéons de la nation polonaise. Dans ce qui est devenu une forêt en pleine ville, vous pourrez lire en filigrane l’histoire complexe et dramatique des Juifs de Pologne.
Le Cimetière juif na Okopowej se trouve dans le quartier de Wola à l’ouest de la Vieille Ville de Varsovie et au nord ouest du Palais de la Culture. Il est limitrophe des cimetières de Powazki, du cimetière catholique au nord et du cimetière évangélique au sud.
Le cimetière couvre une superficie d’environ 33,5 ha et compte environ 200 000 pierres tombales. Certaines parmi les plus originales de l’art funéraire juif en Pologne. Le cimetière est ouvert et dessert la communauté juive de Varsovie et ses environs. Il est le 2e plus grand en Pologne après le cimetière juif de Lodz.
L’autre cimetière juif de Varsovie, le cimetière de Brodno se trouve sur la rive droite à Praga. Il servait de lieux de sépulture aux habitants juifs de Varsovie plus modestes.
Histoire du plus grand cimetière juif de Varsovie
Le cimetière juif est fondé en 1806. Varsovie fait alors partie de l’empire prusse. Pour en savoir plus sur l’histoire de Varsovie.
Le cimetière est divisée en plusieurs parties, premier témoignage de la complexité et de l’hétérogénéité de la communauté israélite :
- Juifs orthodoxes, subdivisé entre hommes et femmes. Les vierges n’étaient pas enterrées à proximité des mères de familles, les hommes pieux n’étaient pas enterrés à côté d’autres juifs peu religieux.
- Juifs progressifs ou réformés. Les Juifs assimilés avaient la permission d’avoir des tombes familiales, où hommes, femmes et enfants pouvaient être enterrés côte à côte.
- Cimetières pour les enfants,
- Cimetière militaire et ghetto.
- Les suicidés et les apostats étaient généralement enterrés loin des autres au pied de la cloture.
Le cimetière reflète toute la diversité des destins de la communauté juive, des religieux hassidiques sont enterrés non loin d’hommes et de femmes de théâtre, des patrons d’industrie voisinent avec des socialistes, des tenant de l’assimilation avec des sionistes, il y a des chercheurs, des médecins, des artistes, journalistes, écrivains, activistes sociaux, banquiers et propriétaires terriens et des milliers d’anonymes victimes de la malnutrition et des maladies dans le ghetto…
Chez les Juifs ashkénazes, une tombe est généralement constituée d’une dalle verticale terminée par une couronne rectangulaire, triangulaire ou semi-circulaire. L’épitaphe en hébreu était située du côté est. Les défunts ont été enterrés face à Jérusalem. Le matzevah est souvent soutenu à l’arrière par un bloc de pierre de section rectangulaire ou semi-circulaire rarement décoré.
Vers 1800, en relation avec les courants d’assimilation dans les cimetières des grandes villes les pierres tombales ressemblent avec élégance aux monuments placés dans les cimetières catholiques et protestants, tels que les colonnes, les obélisques, les sarcophages, les chapelles monumentales .
Ce style sera adopté par une grande partie des notables, les entrepreneurs, industriels, banquiers, gens de culture et d’art, médecins et politiciens.
En 1900 apparaissent des sculptures, avec des figures humaines ou abstraites inspirés de courants artistiques modernes. Les monuments funéraires sont l’oeuvre de sculpteurs comme Abraham Ostrzeg, Henryk Kuna, Mieczysław Lubelski, Feliks Rubinlicht, Boleslaw Syrewicz, Henryk Stifelman, Mark Antokolski et Natan Rapaport.
Ce dernier réalisa avec Léon Suzin, le monument des héros du ghetto devant Polin, le musée des Juifs polonais de Varsovie.
La première inscription en polonais autorisée par les autorités d’occupation russe date de 1855 même si des noms et prénoms écrits en polonais sont apparus sporadiquement à partir de 1830.
L’inventeur de l’esperanto Ludwik Zamenhof y repose à côté du résistant du ghetto de Varsovie Marek Edelman. Une statue rend hommage au pédagogue Janusz Korczak mort à Treblinka avec « ses » orphelins.
Pendant la guerre, le cimetière faisait partie du ghetto de Varsovie. C’était l’un des lieux de contrebande permettant à de la nourriture d’entrer depuis la partie « aryenne » de la ville. Un potager était même planté pour essayer de nourrir les habitants prisonniers des nazis.
Cimetière juif de Varsovie aujourd’hui
Le cimetière na okopowej est l’un des 7 cimetières juifs en activité en Pologne (sur plus de 1100 recensés dans les frontières d’après 1945).
Il s’agit d’un lieu romantique et silencieux. D’une forêt dense où les arbres s’élèvent sur un sol sablonneux puis s’effondrent quand le vent souffle sur les stèles les plus hautes. Les stèles de taille égale sont épargnées comme pour témoigner d’une justice et d’une égalité devant la mort.
Des tas de bois coupés, des stèles penchées, brisées, abattus. Des gravats. Des fougères, du houblons et des fleurs. Le bruit des oiseaux et des tronçonneuses en action pour mettre un peu d’ordre la dedans.
C’est immense et vide. On peut n’y croiser personne pendant des heures. Puis apercevoir des conservateurs en monuments à l’oeuvre ou des rabbins pressés de trouver une tombe.
On y ressent une atmosphère d’étrangeté où à la sérénité du bois se mêle la tristesse profonde d’un monde à jamais disparu.
Symbole et lecture des sépultures juives
On trouve sur les tombes juives différentes représentations symboliques sculptées du nom, de la profession, des mérites du défunt ou des symboles de la mort, de la tristesse, du deuil. Il est interdit dans le judaïsme de représenter des figures humaines. Les motifs animaux et végétaux prennent le relais.
C’est vrai à Varsovie mais aussi dans les cimetières juifs de Cracovie (Cimetière Remuh et Nouveau cimetière juif), au cimetière juif de Prague, Berlin, Budapest et ailleurs.
- Mains jointes dans un geste de bénédiction – le symbole des mains bénissantes est placé sur les tombeaux des Cohen (prêtres), issus de la lignée biblique du grand prêtre Aaron. Dans un tel geste, les rabbins ont joint leurs mains lors de certaines prières. Le plus souvent, le symbole des mains bénissantes se trouve sur les tombes des rabbins et des tsadiks. Leurs ancêtres servaient de prêtres au Temple de Jérusalem,
- Pichet et bol – ce symbole peut être vu sur les tombes des morts, dont les racines remontent à la tribu Lévite, descendante de la famille Lévi, dont le devoir était d’aider pendant les prières. Ces personnes étaient chargées, entre autres, de laver les mains des prêtres ou de lire la Torah dans la synagogue.
- Les livres représentent les libraires, mais aussi ceux qui apprennent et étudient la Torah et le Talmud,
- Bougie et chandelier – Le signe de la bougie sur la pierre tombale signifie qu’une femme est enterrée ici. Selon le judaïsme, dans une famille juive, c’est une femme qui allume les bougies du sabbat. Nous pouvons également rencontrer le symbole d’une bougie cassée qui signifie une vie interrompue. D’autre part, les chandeliers – à sept branches – sont un symbole du judaïsme et du Temple de Jérusalem.
- La couronne est le couronnement de la Torah, symbole de piété et d’apprentissage,
- La couronne asymétrique souligne que le défunt était le chef d’une famille ou d’une commune
- La tirelire souvent représenté avec une main versant une pièce de monnaie symbolise la bienfaisance du défunt. Habituellement, ce symbole se trouve sur les tombes des femmes.
- Couronne – ce symbole est expliqué dans la citation de Pirke Awot : « Il y a trois couronnes : la couronne de la loi, la couronne de la prêtrise et la couronne de l’autorité, mais la couronne de bonne réputation se dresse au-dessus de toutes. » Le symbole de la couronne peut être trouvé sur les tombes de rabbins ou de personnes qui jouissaient d’une reconnaissance et d’un respect généraux.
- Le lion est un signe de la tribu de Juda, le peuple d’Israël. Le lion symbolise le pouvoir, la force, la rédemption et la libération. Souvent, le lion est associé à une couronne ou un rouleau de la Torah. Le lion est aussi le symbole des dénommés Arie.
- L’oiseau est un symbole de l’âme. Un oiseau avec des poussins sur la pierre tombale renseigne sur le nombre d’enfants rendus orphelins par la mort de l mère.
- Le serpent symbolise l’apothicaire,
- Un arbre, des fleurs ou de la vigne représente l’arbre de vie.
- Un arbre cassé, une tige de fleur brisée, des bougies sont des représentations d’une mort subite et brutale.
- La licorne est un symbole d’un homme juste et un signe de salut.
En partie traduit de http://cmentarze-zydowskie.pl/
Les pierres tombales juives comportent aussi des symboles provenant d’autres cultures comme l’urne, la colonne cassée ou le sablier.
Certains noms des défunts sont représentés par des animaux :
- Un lion : Arie, Lejb et Judah,
- Un cerf : Cwi, Hirsz, Naftali,
- Un ours : Dow, Ber,
- Un loup : Wolf, Zeew, Benjamin,
- Un oiseau : Cipora, Fajga.
Sculptures d’Abraham Ostrzeg
Abraham Ostrzeg est le plus célèbre sculpteur polonais d’origine juive d’art funéraire.
Ses sculptures d’inspiration expressionnistes, symboliques et géométriques se référent à l’art juif ancien. Certaines oeuvres figuratives brisent l’interdiction religieuse de montrer un visage humain, ce qui lui vaut la reconnaissance des juifs progressistes et une profonde hostilité des juifs orthodoxes. Ces derniers l’ont forcé à plusieurs reprises à changer ou à retirer des pierres tombales allant jusqu’à en endommager ou en détruire certaines.
Pendant la guerre, il est emprisonné dans le ghetto de Varsovie avant d’être déporter et assassiner au camp d’extermination de Treblinka.
Il reste près de 60 monuments au cimetière juif de la rue Okopowa à Varsovie.
Informations pratiques sur le cimetière juif de Varsovie na Okopowej
Le Cimetière juif na Okopowej se trouve dans le quartier de Wola à l’ouest de la Vieille Ville de Varsovie et au nord ouest du Palais de la Culture.
Adresse : Okopowa 49/51
Horaires d’ouvertures : Lundi au jeudi de 10h à 17h. Vendredi: 9h à 13h. Dimanche: 9h à 16h. Fermé le samedi.
Tarif d’entrée (en 2024) : 10 zl.
Site officiel : https://cmentarzzydowski.pl
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