La synagogue Salat Al Azama à Marrakech est la seule synagogue ouverte à la visite et un intéressant musée sur les Juifs marocains.

A l'intérieur de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.
A l’intérieur de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.

La synagogue Salat Al Azama est située dans le Mellah (quartier juif) de Marrakech.

Le Mellah compte aujourd’hui 3 synagogues sur les 35 lieux de culte (de rituels et d’étude) à son âge d’or.

Carte du Mellah (quartier juif) de Marrakech avec les synagogues actives ou non. Image du Musée Juif.
Carte du Mellah (quartier juif) de Marrakech avec les synagogues actives ou non. Image du Musée Juif.

Histoire de la synagogue Salat Al Azama

La synagogue aurait été construite en 1492. La date exacte de sa fondation n’est pas connue, la synagogue dans sa forme actuelle date d’une restauration plus moderne.

Elle a été fondée par les Juifs séfarades ayant fui l’Espagne (appellés aussi Mégorachim) des « Rois Catholiques » et la chute de Grenade.

Lorsqu’ils arrivèrent à Marrakech, des différences culturelles, liturgiques et rituelles (liées à l’abattage notamment) empêchèrent les nouveaux venus de se fondre dans la communauté juive locale (les Tochavim).

Les Tochavim refusérent au Mégorachim de prier dans la synagogue Rabbi Mordechai Ben Attar.

Ces derniers décidèrent de construire leur propre synagogue « Salat el Azama » aussi surnommée la « Synagogue des dissidents ».

Présentation de la synagogue

La synagogue est intégrée dans un bâtiment plus large comprenant une maison privée avec une agréable cour (sur le modèle d’un riad traditionnel), ce qui était typique des synagogues du Mellah de Marrakech et de Fès.

Le patio servait autrefois de yéchiva (lieux d’étude de la Torah et du Talmud) pour près de 400 enfants du Mellah. Des pièces autour de la cour jouent le rôle de musée juif.

Une aile pour les femmes a été ajoutée après les années 1950, ce qui est unique au Maroc.

La synagogue est toujours en activité et fonctionne comme lieu de culte pour la communauté juive locale.

A l'intérieur de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.
A l’intérieur de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.
Dans la cour de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.
Dans la cour de la Synagogue Salat al Azama de Marrakech.

Musée juif de Marrakech

Le musée constitue une bonne introduction pour comprendre l’importance historique et culturel de la présence des Juifs au Maroc.

Le musée autour du patio relate l’histoire des Juifs marocains, l’histoire juive de Marrakech, celles des Juifs des montagnes de l’Atlas, le rôle de la musique et d’autres spécificités religieuses.

Certains sujets ne sont pas abordés dans le musée comme l’installation des Israélites dans un quartier juif distinct de la population musulmane appelé Mellah. Ce quartier est parfois collé au Palais Royal comme à Marrakech ou à Fès. D’autres mellahs se trouvent à travers le Maroc à Essaouira, Rabat, Salé ou encore Tétouan.

Autre sujet non mentionné, le départ des Juifs marocains dans les années 1950-1960 vers Israël, fruit d’un accord entre le roi du Maroc Hassan II et de l’état d’Israël. Ou comment près de 1700 ans d’histoire faillit disparaitre quand près de 90% des Juifs marocains quittèrent le Royaume pour la Palestine.

Histoire des Juifs au Maroc

Période antique

Il est probable que les premiers Juifs soient arrivés au Maroc à l’époque du roi Salomon (Xe siècle avant notre ère), en compagnie des Phéniciens.

Originaires de la Phénicie, aujourd’hui le Liban, ces marins phéniciens naviguaient depuis les ports de Tyr et de Sidon vers la Méditerranée et les côtes marocaines, ainsi que vers les côtes européennes de l’Atlantique (de l’actuelle Lisbonne aux Cornouailles).

Accompagnant les marins, les Juifs se sont impliqués dans le commerce et ont établi des comptoirs en Ifriquiya (Tunisie) ainsi qu’au Maghreb (Maroc), tout comme en Grèce, en Italie, en France et en Espagne.

Après la destruction du Premier Temple en -581, des Juifs fuyant la Palestine ont rejoint les commerçants établis, arrivant au Maghreb par le désert, à travers la Cyrénaïque et le Sahara, pour s’installer dans des oasis du Sud de l’Atlas.

Aux débuts de l’ère chrétienne, les Romains se sont installés au Maroc, principalement dans un triangle allant de Tingis (Tanger) à Sala Colonia (Rabat-Salé) et Volubilis.

Parmi eux, certains étaient artisans ou commerçants, tandis que les marins juifs ont contribué à l’approvisionnement de Rome en blé, en huile d’olive et même en animaux sauvages d’Atlas, tels que des lions, des panthères et des éléphants, pour les jeux du cirque.

Le plus ancien témoignage de la présence juive au Maroc remonte au IIe siècle de notre ère, découvert dans la ville romaine de Volubilis, où des inscriptions et des symboles juifs ont été trouvés.

Au Maroc, ils ont propagé le judaïsme, ce qui est attesté par les noms de nombreuses tribus berbères, telles que les Ait Moussa (fils de Moïse) et les Aït Daoud (fils de David).

Au IIe siècle, des royaumes juifs sont apparus dans le Sud du Maroc, à Oufrane, Zagora, Tafilalet, Tamegrout, Télouet, et certaines tribus juives ont embrassé la foi chrétienne, acceptant Jésus comme le Messie.

Au Ve siècle, malgré les incursions des Vandales de Genséric et des Wisigoths en Espagne, les nouveaux envahisseurs au Maroc ont généralement coexisté pacifiquement avec les Juifs.

Conquête musulmane de l’Afrique du Nord

Au VIIe siècle, l’avènement de l’islam marque un tournant majeur dans l’histoire du Maroc et de toute l’Afrique du Nord. Après la conquête menée par Ogba ben Nafi, de nombreuses tribus embrassent la nouvelle religion, qui est initialement considérée comme une continuation de la tradition juive.

En 693, le XVIIe Concile de Tolède, capitale du Royaume wisigoth bannit les Juifs d’Espagne, les poussant à chercher refuge au Maroc, notamment dans les communautés du Sud. À la fin du VIIe siècle, les Juifs marocains soutiennent leurs coreligionnaires espagnols dans leur lutte contre les persécutions des Wisigoths. Cela se traduit par des nouvelles persécutions comme une christianisation forcée.

En 711, les Arabes ont établi leur domination au Maroc et entreprennent la conquête de l’Europe. Parmi les forces de Tarik ibn Ziyad, qui donnera son nom à Gibraltar, se trouvent des soldats et des officiers juifs. Après la défaite de Poitiers en 732, certains s’établissent en Espagne et ils contribueront à l’âge d’or du judaïsme sépharade.

Au Maroc, les Juifs vivent sous le régime des différentes dynasties musulmanes. Ils bénéficient de la protection accordée par la dhimma, qui leur garantit la liberté de pratiquer leur religion contre un impôt (dont sont exemptés les Musulmans).

Leur histoire est faite de moments sombres, marqués par des persécutions, des impôts élevés, des conversions forcées et des razzias, mais aussi de périodes de protection. Parmi les grandes familles, on compte des ministres, des conseillers du sultan et des ambassadeurs.

Au 9e siècle, sous le règne des Idrissides, le Maroc devient un centre intellectuel juif important, notamment à Fès, mais aussi à Sebta (Ceuta), Meknès, Sijilmassa, Aghmat et dans la vallée du Draa. Les périodes de persécution sous les Almoravides (11e siècle) et les Almohades (13e siècle) contrastent avec ce qui est parfois qualifié de « grande période juive » sous les Mérinides (15e siècle).

En 1438, le premier mellah est établi à Fès. Ce terme désigne désormais le quartier juif dans les villes marocaines (à l’exception de Tanger), ainsi que les villages juifs du Sud, qu’ils soient près des ksour ou kasbahs musulmans, ou isolés dans les régions rurales.

Après la chute de Grenade

En 1492, une importante partie de la population juive d’Espagne est contrainte de quitter le pays suite à l’édit d’expulsion promulgué par les Rois catholiques.

Beaucoup de ces exilés, appelés mégorachim, trouvent refuge au Maroc. Ils s’installent d’abord à Fès, puis à Meknès et dans le Nord du pays, avant de progressivement rejoindre les villes du Sud.

Fiers de leur culture et de leurs origines sépharades, ils préfèrent souvent rester en marge de la société locale, méprisant les coutumes jugées archaïques des autochtones, les tochavim. Ils érigent leurs propres synagogues et cimetières, à côté des institutions des autochtones.

Principalement engagés dans le petit commerce et l’artisanat, les Juifs marocains jouent un rôle parfois significatif dans le développement économique du pays.

Ils entretiennent des relations commerciales avec divers pays européens et certains agissent même en tant que représentants du sultan. À Mogador, les tajjers al sultan (marchands du roi) contribuent à l’essor de la nouvelle ville, qui devient le port le plus important de la région, notamment en entretenant des liens étroits avec l’Angleterre. Plusieurs Juifs de Mogador s’établissent d’ailleurs en Angleterre.

À la fin du 18e siècle, cette ouverture vers l’Occident est renforcée grâce au soutien de quelques familles aisées. Parmi les réussites notables :

  • Citons Jacob Raphaël Cohen, un riche commerçant établi dans les Antilles, dont le fils est crédité de l’invention de l’eau gazeuse (soda),
  • David Lévy Youli, issu d’une famille de Mogador, qui devient le premier Juif élu au Sénat des États-Unis.
  • La famille Pellas, qui compte des ambassadeurs en Angleterre et aux Pays-Bas, est à l’origine de la communauté juive d’Amsterdam, où elle érige la première synagogue, communément appelée la synagogue « des Portugais », terme utilisé pour désigner les Sépharades en Europe du Nord.

Prix, horaires, billets (réservation) et site officiel de la synagogue Salat Al Azama

La synagogue Salat Al Azama est située dans le Mellah (quartier juif) de Marrakech.

Adresse : R. Talmoud Torah, Marrakesh 40000, Maroc

Horaire d’ouverture : De dimanche à jeudi de 9h à 18h30. Le vendredi de 9h à 16h. Fermé le vendredi.

Prix d’entrée (à plein tarif) en 2024 : 10 drh soit moins d’1 euro.

Site officiel : https://www.jmarrakech.org/t-en-us/ביתי-כנסת-מרקש

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Maciej

J'aime me perdre à la recherche d'endroits surprenants.

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