Explorer la Corse centrale en road trip, c’est s’offrir une traversée bien loin du tourisme de masse. C’est rencontrer des habitants attachés à leurs montagnes, croiser des cochons sauvages et curieux sur la route, s’immerger dans des paysages minéraux d’une beauté stupéfiante. Marcher, écouter, contempler — sans jamais courir. Une ode à la lenteur, au cœur battant de l’île de Beauté.

Si les rivages azurés de la Balagne ou de Porto-Vecchio captent souvent toute la lumière, c’est dans les hauteurs du centre corse que bat le cœur véritable de l’île. La Corse centrale n’est pas simplement une étape intermédiaire entre la côte est et la côte ouest. Elle incarne une expérience à part entière, mêlant haute montagne, forêts profondes, rivières cristallines et villages hors du temps.
Voici un itinéraire de 5 à 7 jours, accessible, équilibré entre nature, culture et détente, pensé pour celles et ceux qui recherchent l’essence authentique de la Corse.
Pour votre voyage en Corse, vous pouvez prendre un vol avec Air Corsica puis louer une voiture sur place. Ou si vous êtes motorisé, rejoindre l’île en ferry depuis Marseille, Nice ou Toulon.
Jour 1 : Corte – Capitale historique et montagneuse
Commencer l’itinéraire à Corte, au cœur de la Corse, permet de plonger immédiatement dans la singularité de l’intérieur insulaire.
Ancienne capitale de la nation corse sous Pascal Paoli, Corte est le point de départ idéal. La vieille ville conserve une citadelle bâtie au XVe siècle qui surplombe la confluence du Tavignano et de la Restonica, ses ruelles pavées en font une étape culturelle de premier plan.
Plus qu’un décor, Corte est aussi un centre intellectuel vivant, siège de l’université de Corse et du musée régional d’anthropologie. Les visiteurs y trouvent un équilibre parfait entre patrimoine, dynamisme culturel et nature sauvage.
La vallée de la Restonica, à quelques kilomètres seulement, offre plusieurs sentiers de randonnée faciles, ponctués de bassins d’eau pure idéaux pour la baignade en été. Dormir sur place permet de profiter de la fraîcheur du soir et de goûter à une gastronomie montagnarde encore très vivante.
Jour 2 : Corte – Venaco – Vizzavona – Col de Vizzavona
En quittant Corte vers le sud, la route nationale 193 s’enfonce dans un paysage de plus en plus boisé. Le bourg de Venaco, dominé par son église baroque dédié à Saint-Michel, annonce l’approche des grandes forêts de Vizzavona.
Au col éponyme, à plus de 1 100 mètres d’altitude (1163 m pour être précis), commence une des balades les plus accessibles et les plus populaires de la région : la marche vers la cascade des Anglais. Le sentier, ombragé et doucement vallonné, mène en moins d’une heure à une série de vasques naturelles dans lesquelles l’eau descend des montagnes en tourbillonnant.
À l’ombre des hêtres et des pins laricio, la promenade invite à la contemplation. Le soir, il est possible de loger dans l’un des hameaux de la région, tels que Bocognano, connu pour ses marrons et son artisanat de montagne.
Jour 3 : De Bocognano à Tavera – Plages intérieures et villages perchés
Depuis les forêts ombragées de Bocognano, l’itinéraire poursuit sa route vers le sud en longeant la haute vallée de la Gravona, en direction de Tavera, modeste village montagnard dont les origines remontent à l’époque médiévale.
Ici, l’atmosphère est celle d’une Corse intérieure, rurale et intacte, où les maisons de granit s’alignent dans le silence, sur fond de crêtes déchiquetées. À quelques pas du village, les églises de campagne et les chapelles votives témoignent d’une religiosité encore palpable dans le quotidien des habitants.
À partir de Tavera, la route s’élève en lacets au cœur du Cruzzini, l’une des micro-régions les plus isolées et les moins connues de l’île. Entre villages perchés, vallons profonds, forêts de châtaigniers, bourgades figées dans le temps. Ces territoires, longtemps enclavés, ont préservé un mode de vie ancestral et une architecture vernaculaire remarquable. Les vues sont superbes sur les pentes du Monte Sant’Eliseu et les dentelures granitiques de la vallée.
En fin de journée, la route atteint Sari d’Orcino, balcon naturel ouvert sur le golfe de Sagone, mais encore profondément attaché à son terroir intérieur. L’endroit, très peu touristique, offre un cadre idéal pour une nuit au calme, entre mer lointaine et montagne toute proche.
Jour 4 : De Sari d’Orcino à Vico, puis vers les calanques
Le lendemain, la descente se poursuit dans une ambiance plus méditerranéenne, à mesure que les crêtes boisées laissent place à un maquis plus lumineux et que les senteurs d’eucalyptus remplacent les parfums humides des forêts d’altitude. En contournant les hauteurs de Casaglione, le voyage atteint Vico, ancienne cité épiscopale bâtie autour d’un couvent franciscain. Le village est l’un des plus beaux exemples d’urbanisme de piémont en Corse occidentale, perché à 400 mètres d’altitude et dominant les premières vagues de collines qui descendent vers la mer.
Le matin peut être consacré à la découverte du centre ancien de Vico, de son clocher baroque, et du marché local si l’on est de passage un jeudi. De là, une route sinueuse mais enchanteresse descend vers Sagone, petite station balnéaire discrète, avant de remonter en direction de Piana par l’une des plus spectaculaires corniches de Méditerranée.
Cette transition du piémont vers les falaises marines, sculptées dans la roche rouge des calanques, offre des points de vue ininterrompus sur le golfe, la mer et les silhouettes dentelées des montagnes. L’arrivée à Piana, en fin d’après-midi, coïncide avec la plus belle lumière du jour : celle qui teinte les falaises d’un rose incandescent et transforme chaque rocher en sculpture. C’est ici que commence une nouvelle séquence du voyage, plus tournée vers la mer, mais toujours habitée par la mémoire de la montagne.
Jour 5 : Village de Piana – Golfe de Porto – Plage de Ficajola, entre granit rouge et criques inaccessibles
Le cinquième jour conduit à l’un des plus beaux panoramas de Corse : les calanques de Piana.
En chemin, le village du même nom mérite une halte. Son architecture harmonieuse, ses maisons ocre et ses balcons fleuris en font un des bourgs les plus photogéniques de l’île. Les calanques de Piana, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, se découvrent à pied ou depuis la route, mais une courte marche permet d’accéder à des points de vue vertigineux sur les falaises de granit rouge plongeant dans la mer.
À quelques kilomètres, une petite route escarpée descend jusqu’à la crique de Ficajola, lieu presque secret où les galets rouges dessinent une plage intime.
Jour 6 : Évisa – Aïtone – Forêt enchantée, au cœur du maquis
Le village d’Évisa, à 850 mètres d’altitude, marque l’entrée dans un monde végétal dense et odorant. Sa forêt, celle d’Aïtone, abrite une biodiversité exceptionnelle. On y marche sous les pins laricio et les châtaigniers, accompagnés par le chant des torrents et les jeux d’ombre.
Le sentier des gorges de Spelunca, accessible à tous, serpente entre ponts génois, piscines naturelles et parois rocheuses impressionnantes. Cette étape offre un moment de fraîcheur et d’isolement rare.
Jour 7 : Retour vers Corte via la Scala di Santa Regina
Pour clôturer ce voyage circulaire, remontez vers Corte par la Scala di Santa Regina, spectaculaire route de corniche creusée dans la roche. Elle surplombe des gorges abruptes et offre l’un des plus beaux panoramas de Corse intérieure.
Le retour vers Corte, qui boucle ce périple intérieur, se fait par la Scala di Santa Regina. Cette route spectaculaire, accrochée aux flancs des gorges, fut jadis la voie principale entre la Balagne et le centre. Elle offre des points de vue saisissants sur les méandres du Golo et les versants abrupts de granit. C’est une conclusion majestueuse à un itinéraire pensé pour révéler la puissance, la douceur et la singularité du cœur de la Corse.