Découvrez l’histoire fascinante de Tétouan, du monde antique aux influences andalouses, en passant par la période mérinide et le protectorat espagnol. Explorez les grandes étapes qui ont façonné cette cité du Rif, carrefour entre cultures méditerranéennes et marocaines.

Adossée aux premières montagnes du Rif et tournée vers la Méditerranée, Tétouan a toujours été une ville frontière : une forteresse surveillant le Détroit de Gibraltar, ce couloir maritime vital où se croisent ambitions politiques, rivalités religieuses et routes commerciales. Un lieu de conquête, de refuge et d’échange.
Un rempart du Maghreb face à l’Europe où les influences berbères, arabes, andalouses, juives et espagnoles imprimèrent traditions, cultures et architecture. Ses remparts, ses patios, ses quartiers hérités du protectorat et ses musées racontent une histoire riche, complexe parfois tragique.
Depuis le Moyen Âge, Tétouan incarne une cité-État à la structure politique originale. Dans les périodes où le pouvoir central marocain s’affaiblit, la ville fut dirigée par de grandes familles patriciennes — marchands, lettrés, militaires — qui constituaient une oligarchie locale capable d’assurer l’ordre, la défense et les échanges commerciaux. Ces lignées, souvent d’origine andalouse, imposèrent à la cité leur prestige et leur vision politique, maintenant un équilibre délicat entre autonomie et fidélité au sultanat.
Comment cette cité, parfois reléguée dans l’ombre de Fès, Marrakech, Tanger ou même Chefchaouen, a-t-elle réussi à préserver une identité aussi singulière et raffinée ?
Voici les grandes étapes de son histoire, des origines antiques à son rayonnement contemporain pour en savoir plus.
Préhistoire et antiquité
Préhistoire de la région
À partir de 6000 av. J.-C., une transformation majeure se produit : les populations adoptent un mode de vie sédentaire fondé sur l’agriculture et l’élevage. Cela entraîne l’apparition de nouveaux outils comme les meules, polissoirs et céramiques.
De cette période datent également les premiers éléments architecturaux, notamment le célèbre cromlech de M’zora, considéré comme l’un des plus importants monuments mégalithiques d’Afrique du Nord.
Vers 3000 av. J.-C., apparaissent les premiers objets métalliques ainsi que de nombreuses gravures rupestres. Cette transition entre Préhistoire et Histoire est qualifiée de Protohistoire, ou encore d’Âge des métaux.
Pour en savoir plus : Rendez-vous au Musée d’archéologie de Tétouan.

Les premiers peuplements berbères
Bien avant la fondation de la ville actuelle, la région de Tétouan fut habitée par des tribus berbères. Ces populations tirèrent profit de la proximité des montagnes et de la mer, développant une culture agraire et pastorale. Le site constituait déjà un espace stratégique, un point de passage entre l’arrière-pays rifain et la Méditerranée.
L’influence romaine
Aux premiers siècles de notre ère, l’empreinte de Rome se fit sentir.
La ville antique de Tamuda, située à quelques kilomètres de l’actuelle Tétouan, en témoigne. Fondée vraisemblablement au Ier siècle av. J.-C., elle prospéra sous l’administration romaine avant d’être détruite au IIIe siècle.
Des vestiges archéologiques — murailles, thermes, mosaïques — témoignent de cette période où le territoire s’ouvrait aux flux méditerranéens. Ils sont visibles dans le Musée d’archéologie de Tétouan.

Le Moyen Âge : naissance, destruction et renaissance
La fondation sous les Mérinides (XIIIᵉ siècle)
La véritable histoire de Tétouan commence au XIIIᵉ siècle, lorsque les souverains mérinides décident d’ériger une petite cité fortifiée sur les ruines antiques.
L’objectif était clair : contrôler les routes menant à Ceuta et sécuriser les confins du nord du Maroc. Tétouan prit alors une dimension stratégique, mais demeura encore modeste par rapport aux grandes cités impériales.

La destruction portugaise (1437)
Au XVe siècle, l’expansionnisme ibérique bouleversa l’équilibre.
Après la prise de Ceuta en 1415 (mais pas encore d’Asilah sur l’océan Atlantique), les Portugais détruisirent Tétouan en 1437 afin de réduire la menace des corsaires musulmans qui trouvaient refuge dans son port. La ville fut laissée en ruines, désertée et oubliée pendant plusieurs décennies.
Puis Tétouan devint une zone de tension constante. Les Espagnols, héritiers de la Reconquista, nourrissaient le projet d’étendre leur domination au sud du Détroit. La ville, en retour, s’érigea en bastion défensif du Maroc, mais aussi en base maritime d’où partaient corsaires et flottes locales pour contrecarrer les ambitions ibériques.
Cette vocation militaire et maritime forgea durablement son identité : Tétouan fut autant une citadelle retranchée qu’un carrefour d’influences, oscillant entre fermeture stratégique et ouverture commerciale.
La renaissance andalouse (fin du XVe siècle)
La véritable métamorphose eut lieu à la fin du XVe siècle, avec l’arrivée massive des réfugiés andalous chassés d’Espagne après la chute de Grenade en 1492. Des milliers de musulmans andalous — artisans, érudits, musiciens, commerçants — franchirent le Détroit pour trouver refuge sur la rive africaine.
Sous l’impulsion de Sidi Ali al-Mandri, officier grenadin, la ville renaquit littéralement de ses cendres. Ces exilés apportèrent leur savoir-faire architectural, artistique et artisanal.
Ces réfugiés apportèrent avec eux l’héritage de l’Andalousie nasride : un art raffiné, un goût pour l’urbanisme régulier, et une conception spirituelle du monde où l’esthétique servait la mémoire. L’empreinte andalouse se perçoit encore dans la joaillerie délicate, la broderie d’or et d’argent, la musique arabo-andalouse et les arts décoratifs — héritage direct des ateliers de Grenade.
Un siècle plus tard, une nouvelle vague d’exilés, les morisques expulsés d’Espagne en 1609, vint renforcer cette identité. Avec eux, Tétouan s’affirma comme un bastion culturel andalou, où la mémoire d’Al-Andalus survécut à la disparition du royaume de Grenade.
Tétouan devint alors une cité andalouse hors d’Andalousie, avec ses patios fleuris, ses maisons blanchies, ses zelliges raffinés et ses traditions musicales héritées d’Al-Andalus.

L’époque moderne : Tétouan, ville cosmopolite et carrefour des échanges
L’âge d’or andalou et méditerranéen (XVIᵉ – XVIIIᵉ siècles)
Aux XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, Tétouan connut un essor remarquable grâce à son rôle commercial et maritime. Ses habitants, souvent issus des grandes familles andalouses, développèrent des échanges avec l’Espagne, l’Italie et l’Empire ottoman.
Tétouan s’impose comme une ville cosmopolite. Les sources de l’époque estiment qu’environ 10 % de la population était juive, soit une personne sur dix. Cette communauté, implantée dans un Mellah distinct, participa activement à la vie économique et artisanale de la cité.
La coexistence entre Andalous, Marocains, Juifs et parfois Européens donna naissance à une société urbaine hiérarchisée mais dynamique, marquée par le commerce maritime et les échanges culturels. Le port de Tétouan devint le principal débouché méditerranéen du nord du Maroc, ouvrant le pays à l’Europe, au Proche-Orient et à l’Afrique subsaharienne.
On disait alors que Tétouan était la fille de Fès : la première héritait du prestige intellectuel et religieux de la seconde, tout en lui servant de porte sur la Méditerranée.
La ville acquit également une réputation de centre spirituel et intellectuel, attirant des érudits et des artisans réputés.
Tétouan a souvent évolué dans les interstices de l’histoire marocaine : trop éloignée du pouvoir central, mais trop stratégique pour être ignorée. Lorsque l’autorité du sultan s’affaiblissait, la ville s’organisait autour de ses élites locales — de grandes familles marchandes et religieuses qui géraient la cité comme un petit État autonome.
Cette indépendance de fait, parfois tolérée, parfois réprimée, conféra à Tétouan une réputation d’insoumise mais fidèle, un équilibre entre la fierté régionale et l’appartenance au royaume.
Une cité corsaire et un marché des esclaves
La proximité de la mer fit aussi de Tétouan un refuge pour les corsaires, qui menèrent des expéditions contre les navires européens. Cette activité, à la fois redoutée et admirée, contribua à la prospérité locale tout en attirant la méfiance des puissances étrangères.
Tétouan, carrefour maritime et place fortifiée, fut aussi un centre du commerce d’esclaves. Dès le XVIᵉ siècle, des captifs chrétiens, prisonniers des razzias ou des corsaires, étaient vendus sur le marché local ou échangés contre rançon.
Les grottes creusées dans la roche calcaire à proximité de la médina servirent de geôles aux captifs. Les chroniqueurs européens évoquent jusqu’à 3 000 esclaves chrétiens détenus simultanément dans des conditions parmi les plus dures de toute l’Afrique du Nord. Ces prisonniers, en majorité espagnols ou portugais, participaient parfois à la construction des remparts, à l’entretien des ports ou à des travaux agricoles forcés.
Cette économie de la captivité reflétait le contexte d’un monde méditerranéen fragmenté, où la guerre maritime, la piraterie et le commerce humain constituaient des réalités indissociables des rivalités politiques et religieuses.
Le XIXᵉ siècle : l’influence européenne et la guerre d’Espagne
À partir du XIXᵉ siècle, Tétouan vit s’intensifier les contacts avec l’Espagne et d’autres puissances européennes.
L’un des épisodes les plus marquants fut la guerre entre l’Espagne et le Maroc, qui culmina par la prise de Tétouan en 1860 par les troupes espagnoles. Cet événement marqua durablement la mémoire de la ville, confirmant son rôle stratégique dans les rivalités coloniales de la Méditerranée.


Début du XXᵉ siècle : capitale du protectorat espagnol
En 1913, avec l’instauration du protectorat espagnol, Tétouan fut désignée capitale du Maroc espagnol.
De nouvelles influences architecturales et urbanistiques se firent sentir, donnant naissance au quartier moderne de l’Ensanche, bâti selon un plan rectiligne d’inspiration espagnole.
Ce statut renforça son importance politique et culturelle. L’architecture de l’époque, mêlant rationalisme européen et traditions locales, transforma son visage urbain. Le quartier du Ensanche devint le symbole de cette modernité coloniale, avec ses avenues bordées de bâtiments officiels et de villas élégantes.
Pendant cette période, Tétouan s’imposa comme un pont entre le Maroc et l’Espagne, attirant intellectuels, diplomates et artistes.
L’influence espagnole marqua durablement la vie quotidienne, la langue et la culture, tout en coexistant avec la tradition andalouse et marocaine.


1956 L’indépendance et l’héritage contemporain
Avec l’indépendance du Maroc en 1956, Tétouan perdit son rôle de capitale administrative au profit de Rabat, mais conserva une place culturelle de premier plan. La ville développa ses institutions éducatives et artistiques, comme l’École des Beaux-Arts, qui perpétue la tradition andalouse dans l’art moderne marocain.
En 1997, la médina de Tétouan fut inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce classement reconnaît son authenticité exceptionnelle, témoin direct de la rencontre entre cultures andalouses et maghrébines.
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